La sécularisation par le bas en Iran : Femmes, familles et relations de genre

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Cet article a été initialement publié dans le dossier “La sécularisation en Iran sous la République Islamique” dirigé par Farhad Khosrokhavar et Marie Ladier-Fouladi.

Après la Révolution de 1978-1979, la République islamique n’était pas encore instaurée quand les nouveaux dirigeants se sont brusquement attaqués aux législations civiles du régime monarchique relatives à la famille et au mariage qui, à leur avis, n’étaient pas conformes aux recommandations de l’islam. Le 26 février 1979, soit à peine deux semaines après le renversement de la monarchie, Khomeiny a ordonné l’arrêt de l’application de la loi intitulée « Protection de la famille » par les tribunaux en attendant que le ministère concerné procède à l’abrogation des articles incriminés dans cette loi. Cette dernière, promulguée en 1967, et amendée en 1974, se voulait favorable aux femmes. En effet, l’État monarchique n’avait pas hésité à légiférer contre les commandements du clergé chiite en fixant pour la première fois en 1967 un âge minimum légal au mariage. Il était alors passé de l’âge pubertaire à 15 ans pour les filles et à 18 ans pour les garçons ; puis en 1974, de 15 à 18 ans pour les filles et de 18 à 20 ans pour les garçons. Cette loi avait, en, outre atténué un droit du divorce jusqu’alors très favorable à l’homme. Désormais, l’époux ne pouvait plus se séparer de sa femme sans « raison valable ». Le droit à la polygamie a été également réglementé : l’homme devait dorénavant obtenir l’accord de sa première épouse pour contracter une nouvelle union. Aussi très important, cette loi avait implicitement retiré aux tribunaux religieux le traitement des affaires familiales pour les confier aux juges laïcs des tribunaux de la protection familiale. Pour combler le vide juridique survenu suite à la décision de Khomeiny, le gouvernement provisoire (de février à novembre 1979), a tout d’abord rabaissé l’âge minimum légal au mariage à 15 ans pour les filles et à 18 ans pour les garçons, dès mars 1979[1]. Puis, en septembre 1979, suivant un décret approuvé par le Conseil de la révolution, il a réinstauré les tribunaux religieux sous le nom de « Cours civile spéciale », dont les juges devaient être obligatoirement mojtahed (docteur en jurisprudence musulmane), et abrogé en même temps les articles de la loi relatifs au divorce. Dès lors, les droits des hommes à la répudiation unilatérale de leurs épouses et à la polygamie ont été rétablis.

Survenus dans un laps du temps très bref, ces changements régressifs des lois civiles, mettent bien en évidence l’intention inébranlable des nouveaux dirigeants iraniens d’imposer leur vision théocratique afin de rendre la formation de la famille conforme aux règles de la charia[2]. Il va sans dire que cette tentative de dé-sécularisation[3] moyennant une re-légitimation des traditions ancestrales de la domination masculine avait pour cible principale les femmes. Mais les femmes iraniennes qui avaient massivement et très activement participé, aux côtés des hommes, aux journées révolutionnaires de 1978-1979 – ce qui a constitué leur première action collective de contestation politique contre le régime monarchique – avaient pris confiance en elles et dans leur capacité à sortir de leur soumission traditionnelle et à peser sur leur destin. Elles n’étaient donc nullement disposées à laisser les dirigeants islamistes les renfermer dans la position de subordination, n’ont-elles pas tardé à réagir contre cette régression de leur statut létal. Ce fut surtout à la fin de la guerre Irak/Iran (1980 à 1988), que les femmes ont commencé à contester les lois et les traditions, ainsi que les interprétations qu’en faisaient les autorités politiques et religieuses, quand elles étaient défavorables[4]. Elles ont même mobilisé divers moyens pour défier les règles matrimoniales inégalitaires promues par l’État islamique[5].

Notre objectif, ici, consiste à montrer comment les femmes iraniennes, à travers la prise de conscience de leur réelle place dans la sphère privée comme dans la sphère publique, et aussi par leurs protestations contre des lois discriminatoires à leur égard ont contribué à la re-sécularisation de la société sous la République islamique[6].

Les femmes continuent leur révolution

La lutte des femmes contre les lois et politiques discriminatoires à leur égard s’est engagée dans l’espace privé et en particulier dans la plus profonde intimité de leur corps. C’est, en effet, par la maîtrise de leur fécondité qu’elles ont commencé à résister aux injonctions religieuses et au modèle traditionnel de la famille. Rappelons que jusqu’à la fin des années 1960, les traditions patriarcales prédominaient les familles iraniennes. Selon ces traditions, la haute fécondité était la règle et la femme, déjà reléguée du fait de son sexe dans une position d’infériorité et de subordination, devait, au service de son époux, mettre des enfants au monde pour agrandir sa famille. En 1966, par exemple, chaque femme iranienne mettait, en moyenne, au monde 8 enfants[7]. La fertilité de la femme était ainsi un gage de prolongement de sa vie conjugale, menacée par la répudiation qui sanctionnait, en premier lieu, l’infécondité. Procréer et élever ses enfants formaient, en conséquence, l’identité et la fonction unique de la femme, sans cela marginalisée. Durant ces années, l’emprise des traditions a été telle que la politique de planification familiale du gouvernement monarchique (1967-1977) n’a même pas pu atteindre ses objectifs minimaux. De la sorte, la fécondité n’a baissé que très lentement et à la veille de la Révolution de 1978-1979, chaque femme mettait encore au monde 7 enfants en moyenne.

La République islamique, en renouvelant les valeurs traditionnelles, cherchait en réalité à maintenir ce modèle traditionnel de la famille. Aussitôt instaurée, elle a abolit la loi qui légalisait l’avortement et mis fin aux programmes de planification familiale et en particulier aux campagnes publicitaires de contrôle des naissances. Elle justifiait sa première décision pour des considérations religieuses et la seconde par des motifs politiques. Il importe, en effet, de rappeler que l’islam n’est pas contre l’usage des contraceptifs et Khomeiny, en personne, avait clairement autorisé le recours aux contraceptifs par une fatwa prononcée en septembre 1979[8]. Les démographes, principalement en Occident, n’ont pas tardé alors à réagir, pronostiquant une hausse de la fécondité en raison de l’abandon de planification familiale et donc de la politique démographique du régime monarchique. Contre toutes attentes, la fécondité commença à reculer dès 1986 et cette fois-ci, à un rythme effréné. Elle est ainsi passée de 6,4 enfants en 1986 à 1,9 enfants en 2013. Le déclin le plus spéculaire s’est produit entre 1986 (6,4 enfants) et 2000 (2 enfants)[9], soit une baisse de 70 % en l’espace de 15 ans[10].

La chute de la fécondité, qui fait de la transition démographique iranienne l’une des plus rapides de l’histoire, est l’illustration par excellence de la capacité d’une société à inventer sa modernité en dépit d’un contexte politique et juridique défavorable. Dans la mesure où « le déclin de la fécondité est la partie essentielle d’un large processus d’émancipation[11] », sa maîtrise, en Iran, apparaît comme la démonstration de l’exercice de la liberté individuelle et témoigne avec éloquence des conséquences imperceptibles de la Révolution de 1978-1979. En effet, le processus révolutionnaire et le processus transitionnel avaient conduit à une modernisation accélérée de la société iranienne. Celle-ci a su résister aux valeurs traditionnelles et religieuses, voire rejeter ces valeurs que l’État islamique a cherché à imposer dans la sphère privée et familiale. Cette sécularisation par le bas révèle les transformations en profondeur des dynamiques d’une société qui s’était structurée selon les règles d’un ordre désormais largement obsolète. Il s’agit là d’une mutation d’importance qui peut être aussi appréciée à travers l’examen de la tendance de l’âge au premier mariage des femmes et de leur pratique contraceptive.

Bien que l’État islamique ait rabaissé, l’âge minimum légal au mariage des femmes, l’âge moyen au premier mariage des femmes n’a cessé d’augmenter, en raison de l’allongement des études et de la modernisation des aspirations familiales. Il est passé de 19,7 ans en 1976 à 24 ans en 2011[12]. S’agissant d’une moyenne à l’échelle nationale, cet âge s’avère encore plus élevé, en particulier, dans les grandes métropoles où il dépasse le cap des 30 ans. Compte tenu des deux motifs, cités ci-dessus, qui expliquent l’allongement de la durée du célibat, le retard du mariage peut parfaitement être interprété comme un signe de l’émancipation des femmes iraniennes. D’autant plus qu’aujourd’hui, dans les grandes villes iraniennes, notamment, on observe l’émergence d’une nouvelle catégorie de couple : celui formé d’une jeune femme et d’un jeune homme, tous deux célibataires, qui vivent ensemble[13], à l’instar de concubinage assez largement répandu dans le monde occidental.

La pratique contraceptive est un choix délibéré de la femme qui implique une évolution des mentalités féminines et exige de sa part prise de conscience et motivation. Mais cela n’est, à l’évidence, pas un problème purement individuel, et requiert la transformation préalable de la société dans son entier, et des valeurs sociales qu’elle secrète, conduisant à une définition radicalement nouvelle de la femme et de son rôle. C’est seulement dans ces conditions que la femme peut décider du nombre d’enfants qu’elle désire avoir et s’appliquer ensuite à y parvenir. En Iran, sous la monarchie, malgré la mise en place de la planification familiale (1967-1978) et le déploiement des moyens considérables, seulement 11 % des femmes âgées de 15 à 44 ans auraient suivi le programme de contrôle des naissances. Après la Révolution, en dépit de l’absence des campagnes de limitation des naissances, selon une enquête réalisée par le ministère de la Santé en 1989, 50 % des femmes âgées de 15-44 ans recouraient aux moyens contraceptifs modernes ou traditionnels en 1989[14]. Comparée aux années 1970, la proportion des femmes motivées pour contrôler leur fécondité était, à l’évidence, plus élevée. Cette fréquence importante des pratiques contraceptives n’était certainement pas étrangère à la baisse observée. En décembre 1989, la République islamique dans une logique d’adéquation aux ressources, revient sur sa décision et adopte une politique démographique néomalthusienne. Compte tenu de la motivation des femmes, la politique de population de la République islamique a connu un accueil très favorable, contrairement à celle élaborée par le gouvernement monarchique. Ainsi, la proportion des femmes âgée de 15-44 ans ayant recouru à un moyen contraceptif a continué de croître pour atteindre 74 % en 2000[15].  

Si la hausse continue de la fréquence des pratiques contraceptives des femmes explique, en grande partie, la baisse importante de la fécondité observée depuis 1986, il ne faut pas se tromper : la chute de la fécondité n’avait pas attendu la reprise énergique de la planification familiale par l’État islamique en décembre 1989. Elle avait déjà baissé de 1,7 enfant entre 1978 et 1989. En réalité, l’ampleur de cette diminution dans les années 1990 est d’abord le fait des femmes. Leur choix a été seulement simplifié par les moyens proposés par la planification familiale sous la République islamique. L’État théocratique qui, pour préserver l’équilibre des ressources, était contraint de pratiquer une politique néomalthusienne, a dû, paradoxalement, accompagner les femmes dans leur projet d’aspiration séculariste. Ainsi, en créant les conditions de leur réussite, il a incontestablement accéléré la tendance à la baisse de la fécondité.

La motivation des femmes iraniennes au regard de la maîtrise de leur fécondité met bien évidence la nouvelle définition qu’elles donnent de leur rôle dans l’espace familial et social. Mais les femmes ont dû parcourir un long chemin pour y parvenir : leur participation massive à la Révolution, a été déterminante pour montrer, à elles-mêmes d’abord et à la société tout entière ensuite, le rôle qu’elles étaient capables de jouer au bénéfice de la société. Fortes de cette expérience unique, comme légitimées par un pouvoir qu’elles avaient contribué à installer, elles se sont constituées en principales actrices sociales de la sécularisation de la société iranienne. Avec cette transformation majeure et inédite dans l’histoire sociale de l’Iran, on peut légitimement penser que les femmes continuent leur révolution, aussi bien et indissolublement, démographique que sociale et politique.

La sécularisation des relations au sein de la famille

Dans les années 1970, bien que la nucléarisation de la famille se soit accélérée, dans les villes aussi bien que dans les campagnes, la famille nucléaire conservait toujours les traits de l’ancien modèle. Ainsi, au sein de la famille qui comptait encore 6 à 7 personnes en moyenne, le père, seul dispensateur du revenu – même si ce n’était pas que par son travail – disposait du pouvoir absolu, et les rapports entre les membres de la famille étaient caractérisés, suivant le système patriarcal, par l’hégémonie entre les frères cadets et l’aîné, et la soumission des femmes aux hommes[16]. Aussi, le groupe de parenté intervenait-il, entre autres, dans le choix du conjoint de ses membres et dans les rapports entre les époux au sein de la cellule conjugale constituée. Dans la mesure où la procréation relevait de l’intérêt du groupe familial, celui-ci exerçait aussi une forte pression sur les femmes pour concevoir un nombre élevé d’enfants[17].

Après l’instauration de la République islamique en 1979, qui promouvait la dé-sécularisation des lois, et sur un mode conservateur les valeurs patriarcales, on s’attendait à un retour en arrière et à un raffermissement de ce lien entre la cellule familiale et son groupe de parenté. Contre toutes attentes et prévisions, le processus de la nucléarisation de la famille s’est intensifié dans cette période. Mieux encore, avec la baisse spectaculaire de la fécondité, la domination de la famille nucléaire s’est accompagnée, contrairement à la période précédente, d’une diminution importante de sa taille. Ainsi, depuis les années 1990, la famille nucléaire iranienne paraît plus proche, du moins par sa dimension, du modèle occidental. Elle le serait très probablement par ses rapports familiaux dans la mesure où le contrôle de leur fécondité par les femmes elles-mêmes, indique l’affaiblissement du pouvoir du groupe de parenté au profit d’une logique d’autonomisation des familles et des individus. De surcroît, en diminuant considérablement la taille de la fratrie, la baisse importante de la fécondité a réduit sensiblement les possibilités de rapport hiérarchique entre frères et sœurs[18]. Cela signifie l’ébranlement du système patriarcal qui prédominait jusqu’alors la famille iranienne. Par ailleurs, la réduction effective de la taille de la famille modifie indubitablement les relations affectives entre conjoints aussi bien qu’entre parents et enfants. 

Si l’on admet que le contrôle de la fécondité provient d’une prise de conscience de leur rôle par les femmes, il est alors certain qu’elles sont parvenues à s’imposer au sein du couple comme un partenaire à part entière qui a son mot à dire sur le nombre d’enfants désirés. Ainsi, en se réappropriant leur fécondité, les femmes sont sorties de l’espace de la domination masculine pour gagner dignité et égalité[19]. Désormais, les relations établies au sein de la famille sont fondées sur le dialogue et le respect réciproque, comme le confirment les résultats d’une enquête sociodémographique que nous avons réalisée en Iran, en 2002[20]. En effet, une grande majorité des femmes interrogées déclarent décider, avec leur conjoint, des questions en rapport avec les enfants aussi bien que des questions plus matérielles. Elles refusent, ainsi, de jouer exclusivement le rôle d’épouse soumise et de mère de nombreux enfants. La plupart d’entre elles sont pour l’égalité des droits entre hommes et femmes dans l’accès à l’éducation, à l’emploi et dans le choix du conjoint. Ce sont surtout les plus jeunes et les plus instruites d’entre elles qui aspirent à une égalité entre les sexes aussi bien dans le domaine familial que dans le domaine socio-politique, même si le contexte politique et juridique ne s’y prête pas[21].

Étant donné les résultats de notre enquête, les femmes ont donc réussi à modifier leur situation dans la vie familiale et sociale en dépit de lois et de règles qui ne leur reconnaissent pas l’égalité des droits avec les hommes. Certes, elles sont encore loin de vivre un rapport égalitaire avec leur conjoint, mais les progrès notables qui ont permis aux jeunes générations de réduire assez vite leurs écarts avec les hommes, laissent penser que ces changements sont possibles et qu’ils ne tarderont pas à émerger. Nous pouvons, en conséquence, penser que la famille constitue le lieu où les femmes ont réussi à ébranler l’ordre patriarcal et, par là-même, à équilibrer les rapports de genre.

La clé de voûte de ce processus de sécularisation est sans doute le progrès de l’instruction scolaire des jeunes générations de femmes depuis le début des années 1980. Rappelons qu’en raison de la politique ségrégationniste du régime monarchique, qui délaissait les régions rurales et périphériques au profit, notamment, des grandes villes, une partie importante de la population, et tout particulièrement des femmes, ne pouvait accéder au savoir. En 1976, seulement 28 % des femmes en âge de procréer (15-49 ans) étaient alphabétisées : 50 % dans les villes et 8 % dans les campagnes. Leur scolarité ne durait, en moyenne, que 1,9 an : 3,6 ans dans le secteur urbain et 0,4 an dans le secteur rural. Compte tenu du fait que la relation entre la fécondité et la scolarité des femmes s’inscrit dans un cycle opposé, ce faible niveau de l’instruction scolaire explique, en grande partie, le niveau élevé de leur fécondité durant les années 1960 et 1970.

Après la Révolution, les dirigeants islamistes furent contraints de redynamiser la politique d’éducation et d’étendre le système scolaire afin de répondre aux attentes d’une population qui venait de renverser la monarchie et comptait sur le nouveau régime pour améliorer ses conditions de vie et son accès à l’éducation, à la santé et au logement. Pour se distinguer clairement du régime monarchique, l’État islamique affirma son engagement pour une diffusion large et gratuite du savoir, stipulé dans l’article 30 de la Constitution.

Malgré des insuffisances dans l’organisation de la scolarité et l’alphabétisation, notamment au début des années 1980, cette ouverture massive de l’école fut particulièrement bénéfique aux femmes dont l’accès au savoir progressa à une cadence accélérée. De sorte qu’en 2006[22], la proportion des femmes alphabétisées âgées de 15 à 49 ans s’élevait à 87,4 % (92,1 % en ville et 76,5 % dans les campagnes). Leur scolarité durait, en moyenne, 8,9 ans (10,0 ans dans les villes et 6,2 ans dans les campagnes). Le niveau d’instruction des femmes rurales peut paraître encore faible, mais comparé aux années 1970, les progrès s’avèrent cependant notables. L’avancement rapide du projet de développement socio-économique du monde rural, notamment la multiplication des voies de communications, lui a permis de réduire son écart avec le monde urbain. Ce nouvel environnement a favorisé la diffusion, à une échelle de plus en plus étendue, des nouvelles idées et des comportements sociaux en provenance des villes, et activé, de ce fait, le processus de sécularisation de la société rurale iranienne.  

Plus notoire encore fut la réduction de l’inégalité entre les hommes et les femmes appartenant aux mêmes générations dans l’accès au savoir. À ses débuts, l’école iranienne ne profitait qu’aux garçons. La société traditionnelle patriarcale a résisté pendant des décennies à son ouverture aux filles, en particulier dans les campagnes. Il fallut attendre la démocratisation diffusion massive de l’école pour qu’enfin, les petites filles y accèdent. Dès lors, grâce à l’allongement de la durée de leur scolarité, les jeunes générations de femmes n’ont cessé de se rapprocher du niveau d’instruction des hommes, voire de le dépasser dans les villes. En 2006, la scolarité des femmes, âgées de 20 à 24 ans (la génération née en 1982-1986), avait une durait en moyenne 10,4 ans contre 9,9 ans pour les hommes d’une de même classe d’âge. En milieu rural également, les femmes réduisirent à grands pas l’écart avec les hommes. Ce fut tout particulièrement le cas des jeunes générations, nées entre 1987 et 1991 (âgées de 15 à 19 ans) dont la durée moyenne de scolarité s’avérait très proche de celle des hommes de même génération : respectivement 7,1 ans pour les femmes et 7,9 ans pour les hommes. Ce progrès, observé depuis la décennie précédente, témoigne du changement de mentalité de populations rurales qui ne semblent plus réticentes à l’égard de la scolarisation des filles.

Enfin, l’instruction scolaire des jeunes femmes a pris, depuis 2000, une tournure significative dans les universités avec un nombre d’étudiantes s’étant sensiblement approché de celui des garçons pour le dépasser dès la rentrée 2002-2003. En 2006-2007, 52,4 % des 2,8 millions d’étudiants étaient des femmes. Cette tendance étant récente, l’excédent féminin sur le nombre total des étudiants s’arrête pour le moment au niveau de la licence[23]. Cette configuration inédite met bien en évidence la détermination des jeunes iraniennes à rompre définitivement avec les traditions patriarcales et à emprunter les chemins qui mènent à davantage d’émancipation.

La nouvelle génération de jeunes s’est donc construite dans cet environnement sociodémographique sécularisé. La crise économique endémique, d’une part, et la modernisation du marché du travail ainsi que celle des aspirations familiales, d’autre part, ont conduit la jeunesse iranienne à allonger la durée de sa scolarité, notamment dans le but d’augmenter ses chances de décrocher un emploi stable. Par conséquent, l’âge au premier mariage des jeunes n’a cessé de croître, contribuant ainsi au prolongement de la durée de cohabitation des jeunes avec leurs parents, et par-là même, à l’allongement de la durée de la « jeunesse »[24]. Cette configuration est inédite dans l’histoire de la famille iranienne. Pour la première fois au sein de ces familles, cohabitent durablement des jeunes dont le niveau scolaire dépasse celui de leurs parents, notamment celui des pères. À la hiérarchie des classes d’âges se succède alors la hiérarchie du savoir qui contribue largement à la sécularisation des relations intergénérationnelles. Selon les résultats de notre enquête de 2002, les rapports entre parents et enfants, et en particulier entre les pères et leurs enfants, sont désormais établis davantage sur le dialogue, et peut-être même sur le conflit, que sur les traditionnels comportements d’obéissance et de soumission émanant de l’ordre patriarcal. Il apparaît ainsi que suite à la Révolution de 1978-1979, s’établit, dans une majorité écrasante des familles, urbaines comme rurales, un nouveau rapport intergénérationnel que nous qualifions de « démocratique ».

Lutter pour les droits des femmes et l’égalité entre les sexes  

Dans les années 1960 et 1970, bien que le contexte politique et juridique parût propice à la modification du statut de la femme et à son accès à la vie sociale et politique[25], les Iraniennes n’étaient paradoxalement pas sensibles aux articles discriminatoires du Code civil[26]. La mise en cause des traditions ancestrales et des lois islamiques par les femmes commença au lendemain de la Révolution de 1978-1979. Ces générations de femmes qui avaient massivement participé aux journées révolutionnaires s’engagèrent alors dans une lutte contre les inégalités entre les sexes, sans pour autant former un bloc homogène. Une partie d’entre elles était issue d’un milieu moderne, formée et diplômée sous la monarchie qui s’inspirait des droits de l’homme et du concept de l’égalité entre les sexes. L’autre partie constituée de plus jeunes, islamistes ou musulmanes pratiquantes qui appartenait aux couches sociales moyennes ou aisées. Ces dernières faisaient une lecture différente des textes religieux, une lecture mettant en avant l’idée d’une « complémentarité » entre les hommes et les femmes[27].

Au début, ces deux courants féministes se méfiaient l’un de l’autre. Bien que leur objectif semblât commun, leur clivage idéologique empêchait toutes tentatives de coopération. Cependant, la distance entre ces deux courants finit par se réduire peu à peu. En effet, même séparés leurs efforts avaient sensibilisé à leur combat une grande partie des jeunes femmes, islamiques et laïques, qui, elles, se mobilisèrent ensemble et sans tabou autour de la question du statut de la femme. Dès le début des années 1990, des articles et des travaux des militantes issues du premier courant furent publiés dans les magazines et les journaux du second. Cette collaboration se renforcera par la suite. De nouveaux mensuels et revues féministes, laïcs ou islamiques apparurent. Des colloques scientifiques et des conférences publiques furent organisés, auxquels participèrent des chercheurs, des juristes, des artistes et des journalistes, pour dénoncer les traditions patriarcales. Ces femmes intervinrent régulièrement sur le terrain juridique pour tenter d’obtenir des réaménagements des lois relatives aux droits des femmes[28].

Ainsi, sans chercher à se positionner dans une logique d’opposition frontale avec la République islamique, ces féministes, par des actions diverses, ont contribué à une prise de conscience par les femmes elles-mêmes des discriminations multiformes dont elles étaient l’objet. C’est, en partie, grâce à leurs dynamisme et mobilisation que les femmes ont participé massivement aux présidentielles de 1997 et de 2001 pour donner la victoire au candidat réformateur Mohammad Khatami. Cependant, ce dernier, durant ses deux mandats, ne se préoccupa jamais de la question de la discrimination à l’égard des femmes ni de celle de l’égalité entre les sexes. Certes, une conseillère du président fut nommée chef du « Centre des affaires des femmes » et les féministes purent développer plus librement des actions culturelles et journalistiques mais ni le président, ni le courant politique « réformateur » ne prirent explicitement de position sur les droits des femmes. La désillusion des féministes fut donc à la mesure de l’espoir que suscita l’élection de M. Khatami.

Tirant donc de nombreux enseignements de cette riche expérience et désormais conscientes de la limite du système politique de la République islamique, les féministes décidèrent d’adopter une stratégie offensive. Cela d’autant que la nouvelle génération de féministes avait commencé à durcir sa prise de position face à la politique discriminatoire de l’État islamique en menant des actions protestataires[29]. La majorité de ces jeunes femmes, nées entre 1975 et 1985, qui vivaient au sein des familles nucléaires une nouvelle relation intergénérationnelle, fondée sur le dialogue et le respect mutuel (voir plus haut), avaient alors intériorisé ces principes que nous qualifions de séculiers. Elles ont donc été résolument déterminées à combattre les valeurs religieuses et traditions patriarcales, promues énergiquement par la République islamique, qui ne leur reconnaissaient aucunement l’égalité des droits avec les hommes. La plupart d’entre elles étant étudiantes, elles ont organisé, en collaboration avec d’autres organisations estudiantines, leurs premières manifestations contestataires, bien évidemment non-autorisées, dans les enceintes des universités sans craindre l’expulsion ou l’emprisonnement[30]. Mais en rejoignant assez rapidement d’autres organisations féministes, elles ont apporté une dimension plus combative au mouvement féministe iranien à la lutte pour l’égalité des droits entre les sexes. Ainsi, à la veille de l’élection présidentielle de juin 2005, les activistes féministes en organisant, en l’espace de dix jours, deux meetings protestataires, l’un contre la disqualification des candidates à la présidentielle du fait de leur sexe et l’autre pour dénoncer la « la violation des droits des femmes dans la Constitution [31]», ont clairement signifié le durcissement de leur action.

Par ailleurs, l’intégrisme affiché du nouveau président de la République, Mahmoud Ahmadinejad, élu en juin 2005, les convainquit de ce que les politiques discriminatoires ciblant les femmes pouvaient s’intensifier. En juin 2006, à l’occasion du premier anniversaire de leur action, elles organisèrent un meeting pacifique à Téhéran pour protester une nouvelle fois contre les discriminations faites aux femmes[32]. C’est lors de ce rassemblement que fut décidée l’idée d’une campagne de collecte d’un million de signatures pour obtenir le changement des lois discriminatoires à l’encontre des femmes. La « Campagne de collecte d’un million signatures pour changer les lois discriminatoires, changement pour l’égalité » (karzar-e yek melyoun emza barâye tagh’ïr ghavânin-e tab’ïz âmiz), connue aujourd’hui sous le nom de « Campagne d’un million de signatures » fut officiellement lancée en août 2006. C’était la première fois que les femmes contestaient directement de nombreux articles des Codes civil et pénal, totalement dé-sécularisés par la République islamique.

L’objectif de cette Campagne était en réalité d’organiser un véritable mouvement social. Ce fut un tournant décisif dans le mouvement contestataire des Iraniennes qui confirmait par-là même son aspiration séculariste. Des militants femmes et hommes recueillaient des signatures dans les lieux publics. Ce mouvement prit d’autant plus d’ampleur que chaque signataire devenait d’office membre de la Campagne et pouvait, s’il le désirait, s’engager à son tour. De surcroît, épaulées par de nombreux juristes défenseurs des droits de l’homme, les féministes multiplièrent les séminaires et les ateliers-débats autour des lois ségrégationnistes et des objectifs de la Campagne. Grâce à un site Internet créé dès le lancement de l’opération, ils s’offrirent un nouvel espace public dans lequel ils diffusaient des informations concernant leur mouvement de façon à rester en contact direct avec les militants féministes résidant à l’intérieur mais aussi à l’extérieur du pays. Ce puissant outil de communication et de mise en réseau, permit à la Campagne de se faire très rapidement connaître du grand public et propagea largement les revendications des féministes. Son succès sur Internet conduisit ses promoteurs à créer, en janvier 2008, L’école féministe, une revue électronique d’informations, d’analyses, de réflexions et de débats autour des mouvements féministes et des questions du genre en Iran et ailleurs. Les articles et les textes mis en ligne contribuaient, non seulement, à enrichir les connaissances théoriques et empiriques des militants sur les études et mouvements féministes, mais aussi, à la diffusion des idées séculières sur les droits des femmes.

À travers cette Campagne, les activistes féministes, femmes et hommes, visaient également à ouvrir le mouvement des femmes à tous les militants du changement socio-politique en Iran. Leur tâche n’était pas simple en raison de l’intransigeance des autorités iraniennes. Plusieurs militantes considérées comme les pionnières du mouvement furent d’ailleurs arrêtées ou convoquées par les tribunaux au motif qu’elles portaient atteinte à la sûreté de l’État, puis condamnées à des peines de prison ferme ou avec sursis. C’était la première fois qu’une telle accusation était infligée aux militants des droits des femmes en Iran ; ce qui témoigne de l’état d’inquiétude de la République islamique face à l’influence grandissante de ce mouvement sur la scène sociale et politique. Mais ces condamnations n’ont pas ébranlé les activistes féministes. La réaction brutale du régime eut même pour conséquence de sensibiliser davantage l’opinion publique iranienne à la question du statut des femmes mais aussi, et surtout, à celle des libertés individuelles. Grâce à ce succès, les activistes féministes ont par exemple réussi, en septembre 2008, à faire supprimer par les parlementaires l’article de nouveau projet de loi autorisant la polygamie.

Originale et moderne, cette action collective naissante met en évidence la maturité acquise par les militantes des droits des femmes au cours de ces dernières années pour se donner, enfin, les moyens de mobiliser les femmes dans un véritable mouvement social. Une nouvelle ère avait alors commencé en Iran, une ère qui devait rapidement révéler le changement important des mentalités et la sécularisation de la société.   

Dans ce nouveau contexte, la question de l’égalité entre les sexes gagnait une légitimité croissante chez la majorité des femmes. L’influence et le prestige acquis au bout de trois années d’activités intenses et continues, faisaient alors du mouvement féministe l’un des plus sérieux interlocuteurs issus de la société civile sur lequel devaient compter les candidats à l’élection présidentielle de juin 2009. C’est la raison pour laquelle les campagnes et programmes électoraux des deux candidats « réformateurs », notamment, prirent un ton de plus en plus favorable aux droits des femmes. L’entrée des thèmes chers aux féministes dans la campagne électorale explique, en grande partie, la participation massive des femmes, issues de toutes les couches sociales, au scrutin de juin 2009, ainsi qu’aux manifestations protestataires postélectorales qui l’ont suivi. La détermination et la capacité de mobilisation des activistes féministes les ont conduites à occuper une place de premier ordre au sein du Mouvement vert, né au lendemain de la présidentielle controversée de juin 2009. Désormais, fortes de cette position, les féministes exigent que leurs revendications s’ajoutent explicitement à celles plus globale du mouvement d’opposition.

Conclusion

Les femmes iraniennes ont donc réussi à mettre en échec la politique de la dé-sécularisation de la société iranienne entreprise par la République islamique. Ce succès ô combien important s’explique en grande partie par leur progrès en termes d’instruction scolaire. L’expansion rapide de l’école au cours de deux premières décennies qui ont suivi l’instauration de la République islamique, a permis aux jeunes générations féminines d’y accéder massivement. Elles y ont non seulement réduit l’écart avec les hommes dans l’accès au savoir, mais aussi prolongé la durée de leur scolarité. Ce progrès notableest certainement à l’origine de la mise en cause du système patriarcal au sein de la famille. C’est dans ces conditions que sont apparus les premiers signes de fléchissement de la fécondité. Une nouvelle ère a alors commencé en Iran, une ère qui n’a pas tardé à révéler un changement important des mentalités, changement touchant d’abord les populations urbaines, puis rurales. Dans ce nouveau contexte, la question de l’égalité des sexes a gagné une légitimité croissante chez la majorité des femmes. Les expériences cumulées au cours de deux décennies 1990 et 2000 et la prise de conscience, notamment chez les jeunes femmes, des discriminations de toutes formes à leur encontre, ont donné naissance, pour la première fois, à une véritable action collective, réfléchie et efficace. Ce combat politique sera certes très difficile à mener. Mais ces femmes qui se sont déjà imposées comme les protagonistes du changement social ont renforcé leurs chances de marquer des points déterminants. Avec cette transformation majeure et inédite dans l’histoire sociale de l’Iran, on peut légitimement affirmer que les femmes se sont constituées en véritables actrices politiques et de la re-sécularisation de la société iranienne.


[1] En 1982, les députés de la première législature sont revenus sur cet article de la loi dans la mesure où ils considéraient que l’âge minimum légal   au mariage déterminé par le gouvernement provisoire n’était pas encore conforme aux règles de la charia. Ils l’ont alors modifié de la manière suivante : « Il est interdit de se marier avant l’âge pubertaire ». Suivant la charia, l’âge pubertaire est de 9 ans pour les filles et de 15 ans pour les garçons.

[2] La loi canonique de l’islam condamnant vivement le célibat considéré comme dangereux pour l’ordre moral de la société, le mariage est jugé par conséquent universel. Elle préconise un mariage précoce, dès l’âge pubertaire des filles et les garçons, accorde aux hommes le droit à la polygamie, jusqu’à 4 épouses légitimes, et à la répudiation unilatérale.

[3] À ce propos, voir aussi dans ce même dossier l’article de F. Khosrokhavar et M. Mottaghi, « L’Iran : de la dé-sécularisation par l’État à la re-sécularisation par la société ».

[4] Z. Mir-Hosseini, “Women and politics in post-Khomeini Iran. Divorce, veiling and emerging feminist voices”, dans H., Afshar, éd., Women and Politics in the Third World, London and New York, Routledge, 1996, p. 142-169.

[5] À ce propos, voir entre autres, les mensuels Zanân (Femmes), Payâme zan (Message de la femme), et l’hebdomadaire Zane rouz (Femme d’aujourd’hui), qui, dans chaque numéro paru au cours des années 1990, consacraient plusieurs pages à ce sujet. Les deux premiers ont commencé à paraître après la Révolution de 1979.

[6] Voir aussi, F. Khosrokhavar, « Two Types pf Secularization » dans S.A. Arjomand et E. Reis (éds.) Words of Difference, New York, London, SAGE, 2013, p. 121-153.

[7] M. Ladier-Fouladi, Iran Un monde de paradoxes, Nantes, L’Atalante, Comme un accordéon, 2009, 347 p.

[8] À la suite de cette fatwa les dispensaires et les centres sanitaires se réorganisèrent et continuèrent de distribuer gratuitement les moyens contraceptifs, bien que de choix restreint en raison de l’instauration d’une économie de rigueur suite à l’embargo économique contre l’Iran et au coût élevé de la guerre. Les contraceptifs étaient aussi mis en vente dans les pharmacies à des prix abordables.

[9] Iran Demographic and Health Survey 2000, Tehran, UNICEF, Ministry of Health and Medical Education, 2002.

[10] À titre de comparaison, la France a pris 150 pour faire baisser de moitié sa fécondité.

[11] R. Lesthaegh, « A century of demographic and cultural change in Western Europe: an exploration of underlying dimensions », Population and Development Review, vol. 9, n° 3, 1983, p. 411-435.

[12] Selon les résultats du recensement iranien de 2011, sources : Centre de statistiques d’Iran.

[13] Voir le dossier que le magazine iranien Zanan emrouz (Les femmes d’aujourd’hui) a consacré à ce sujet intitulé : « Le mariage blanc : un mal ou un remède ? », n° 5, novembre 2014, p. 5-19.

[14] M. Ladier-Fouladi, Population et politique en Iran. De la monarchie à la République islamique, Paris, INED/PUF, Les Cahiers de l’INED, n° 150, 2003, 355 p.

[15] Iran Demographic and Health Survey 2000, op. cit.

[16] Ph. Fargues., Générations arabes, l’alchimie du nombre, Paris, Fayard, 2000, 349 p.

[17] Dj. Behnam, « Familles nucléaires et groupement de parenté en Iran », Diogène, n° 76, octobre – décembre, 1971, p. 124-141.

[18] Ph. Fargues, « La femme dans les pays arabes : vers une remise en cause du système patriarcal ? », Population & Sociétés, n° 387, 2003.

[19] F. Héritier, « Vers un nouveau rapport des catégories du masculin et du féminin » dans E. Beaulieu, F. Héritier et H. Leridon (éds.) Contraception : contrainte ou liberté ?, Paris, Odile Jacob, 1999, p. 37-52.

[20] M. Ladier-Fouladi, « Démographie, femmes et famille : relation entre conjoints en Iran postrévolutionnaire, Revue Tiers Monde, vol. 46, n° 182, 2005, p. 281-305.

[21] M. Ladier-Fouladi, 2009, op. cit.

[22] Dernière année pour laquelle les statistiques sont disponibles.

[23] On pouvait s’attendait à ce que dans les années à venir, le nombre d’étudiants femmes soient plus nombreuses au niveau Master puis doctorat. Un tel cas de figure contraignait l’État islamique à recruter ses cadres supérieurs essentiellement parmi les jeunes femmes diplômées. Afin d’éviter une telle situation, le gouvernement de Mahmoud Ahmadinejad a adopté un système de quota discriminatoire envers les femmes dans la sélection des étudiants à l’entrée de l’université. De sorte qu’en 2007-2008, les effectifs d’étudiants hommes admis dans les universités publiques ont augmenté de 84 % et à l’inverse ceux des étudiants femmes ont baissé de 7 %. L’État islamique a ainsi mis fin à cet excédent féminin sur le nombre total des étudiants dans les universités : elles ne comprenaient que 43 % des 3,3 millions d’étudiants dans les universités (publiques et privées) en 2007-2008.

[24] M. Ladier-Fouladi, « La nouvelle jeunesse iranienne : principale protagoniste du changement », Espace, populations, sociétés, n° 2, 2011, p. 291-303.

[25] En 1963, par exemple, la loi électorale avait été réformée pour y inclure le droit de vote et l’éligibilité des femmes. Après l’adoption de la loi de « Protection de la famille » en 1967, l’accès des femmes aux fonctions de magistrat, jusqu’alors réservées aux hommes, fut facilité.

[26] M. Ladier-Fouladi, 2005, op. cit.

[27] F. Khosrokhavar, « Le féminisme en Iran », dans C. Ockrent et S. Treiner (éds.), Le livre noir de la condition des femmes, Paris, éditions XO, p. 327-335.

[28] M. Ladier-Fouladi, 2005, op. cit.

[29] Pour une explication plus détaillée des actions de ces jeunes féministes voir Kh. Keshavarz Les traces du mouvement des femmes en Iran (1989-2009) : Luttes, défis, réussites, thèse de doctorat en sociologie, sous la direction de F. Khosrokhavar, EHESS, Paris, 2013.

[30] Par exemple, elles ont lancé une pétition et en appelant les parlementaires, revendiqué le retrait du projet de loi qui visait à instaurer un quota pour que 50 % des étudiants admis à certaines filières de médecines soient de sexe masculin. Elles ont réussi à collecter près de 5 000 signatures qui ont été envoyées au Parlement. Kh. Keshavarz Les traces du mouvement des femmes en Iran (1989-2009) : Luttes, défis, réussites, op. cit.

[31] Ibid.

[32] Ibid.