Terrorisme et avant-garde : la question du musée

Mon intervention mettra en relation trois événements : Le « Onze septembre », dont nous commémorons le quinzième anniversaire, la destruction des Bouddhas de Bamyan la même année, et l’Hommage à New York de Jean Tinguely (1960). La question posée est double : la première concerne ce qu’on pourrait appeler la « haine du musée », c’est-à-dire la haine de l’œuvre d’art dans sa version patrimoniale, la seconde, la relation de la modernité à cette détestation du musée.

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L’art à l’époque du terrorisme (Éloge du sabotage)

En 2005, l’ouvrage intitulé Art in the Age of Terrorism dirigé par Graham Coulter-Smith et Maurice Owen, se proposait d’explorer les manières par lesquelles l’art et la théorie de l’art pouvaient contribuer à la compréhension de situations qui nous laissent souvent sans voix. Il s’agissait ainsi de visualiser l’indicible, que cet indicible soit de l’ordre du traumatisme, du déni, des conflits insolubles, de la construction de barrières, de la perte des libertés engendrées notamment par les guerres et le terrorisme.

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La machination terroriste, une rhétorique visuelle de l’effroi

En dehors d’une introuvable définition théorique de ce qu’est le terrorisme en général, il faut revenir à une phénoménologie de nos expériences pour comprendre la spécificité du terrorisme actuel. Je ne suis pas spécialiste du terrorisme mais des images et de leurs effets, je suis d’abord peintre. Mes méditations d’atelier me font écrire sur les rapports qui relient la pratique quotidienne de la peinture et les pratiques d’exercices spirituelles. Je prends donc ici la parole à double titres : d’abord en tant que témoin, ensuite comme praticien de l’image.

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Avant-garde et poseurs de bombes : la réception des attentats anarchistes des années 1890 dans la critique d’art de la presse politique

La multiplication des attentats au début des années 1890 révèle la pénétration des idées anarchistes dans le pays. Leur diffusion est notamment accrue par la mise en place des bourses du travail qui, s’organisant en Fédération au congrès de Saint-Étienne de 1892, contribuent à la propagation de l’anarchie dans les syndicats. Une partie du mouvement ouvrier s’éloigne du radicalisme pour se tourner vers un socialisme proche de celui de Jules Guesde avant de rompre avec l’autoritarisme de ce dernier, choisissant l’anarchisme et le syndicalisme révolutionnaire. Selon Jean Maitron, en 1894, l’influence de la propagande anarchiste toucherait une centaine de milliers de personnes dont un millier de militants actifs, quatre mille cinq cents sympathisants engagés et cent mille personnes partageant les opinions libertaires. Ces militants sont bien souvent des intellectuels, parfois des artistes, mais également des autodidactes issus des milieux populaires urbains.

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Du fanatisme au terrorisme : Voltaire et nous

Encensé et détesté tout au long des XVIIIe et XIXe siècles, Voltaire était alors un des écrivains français dont la présence sociale était la plus perceptible. Un « voltairien », c’est tout au long du XIXe siècle, et ce, à l’échelle de l’Europe entière, un ennemi des valeurs traditionnelles et de la religion : c’est ainsi par exemple qu’est désigné Cavaradossi par ses ennemis dans la Tosca de Puccini. Un anti-voltairien, c’est au contraire un défenseur de tout ce que ceux qui se rallient au nom de Voltaire prétendent attaquer, et ce, très tardivement. Presque aucun autre écrivain ou penseur moderne, à l’exception évidemment de Marx, ne peut se vanter d’avoir ainsi concentré dans son nom un tel affrontement concernant la société tout entière sur le terrain des valeurs, et l’on peut dire que sa gloire a vécu bien longtemps, beaucoup plus que de l’admiration esthétique ou littéraire suscitée par ses œuvres, du mélange de haine et d’adhésion passionnées qui le mettait au cœur d’une profonde déchirure sociale.

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Mise en scène du terrorisme en art contemporain français (1990-2010) entre fiction et réalité, de l’inconcevable à l’hypothétique

Comme le constate Sol LeWitt dans un entretien de 1968, « lorsqu’il voit le monde s’effondrer autour de lui, l’artiste se demande ce qu’il peut faire. Mais en tant qu’artiste, il ne peut rien faire, sinon être un artiste ». Si une oeuvre contestataire et critique propage avec ferveur ses convictions, elle ne peut malheureusement ni endiguer ni arrêter en soi et par elle-même un conflit armé, par exemple. C’est peut-être est-ce en ce sens que LeWitt disait qu’un artiste, « en tant qu’artiste […] ne peut rien faire », puisque son travail n’a semble-t-il aucun impact direct sur le monde en crise.

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La représentation du terrorisme anarchiste dans Germinal et Paris de Zola

En lisant le cycle des Rougon-Macquart comme une transposition romanesque du modèle des sciences thermodynamiques, Michel Serres l’a qualifié d’« épopée d’entropie », le thème de « l’écrasement, [du] gaspillage, [de] la dissémination, [de] la perte, [de] l’irréversible jusant vers la mort-désordre » étant une constante dans la plupart des romans du cycle. Et, certes, il est indéniable qu’entropique ou non, l’œuvre narrative de Zola est marquée d’un bout à l’autre par une profonde fascination pour la destruction, la ruine, l’anéantissement, bref pour la violence, surtout lorsque celle-ci se manifeste dans ses formes les plus meurtrières et catastrophiques. Il faudrait ajouter à cette liste toutes les morts violentes qui ne manquent pas dans ses romans, du meurtre du mari de Thérèse Raquin à celui du père Fouan (à la fin de La Terre), sans oublier les suicides qui certes ne font pas défaut (par exemple, celui de Claude Lantier à la fin de L’Œuvre). Dans tous ces cas, quoique très différentes les unes des autres, c’est un même goût pour les scènes fortes et les images effrayantes qui alimente l’imagination romanesque de Zola.

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Réponses romanesques au terrorisme — DeLillo, Dantec, Volodine

Il doit paraître étrange de considérer le terrorisme selon le prisme de l’imagination littéraire et de quelques romans occidentaux, qui seraient alors doués d’un pouvoir face à l’horreur. La question de Sartre : « Que peut la littérature ? », appelle ici, de fait, une réponse négative, suggérée par tous ceux qui ont vu dans le terrorisme l’alliance de l’imprévisible et de la répétition, un sublime négatif ou l’ont perçu comme ce qui constitue un monde sans dehors. Reprendre la question de Sartre s’impose cependant lorsque, face au terrorisme, la littérature tente de retrouver un pouvoir qui ne peut consister en un engagement explicite, une dénonciation, une consolation, ou un discours de vérité — inutile puisque le terrorisme est manifeste, il suffit de le citer.

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Écrire le terrorisme à la première personne : de Boris Savinkov à Zazoubrine

Il s’agira de s’interroger sur les raisons d’être de l’écriture romanesque du terrorisme. À quoi bon cette fictionnalisation ? Que nous dit-elle ? Je montrerai que la réquisition de schémas ou de motifs traditionnels, voire éculés, permet de continuer à tenir un discours humaniste, parfois à l’insu de l’artiste et que le littéraire, loin d’être un ornement, sert de caisse de résonnance à une problématique éthique, en lui donnant une épaisseur charnelle trop souvent absente. Loin de s’éloigner de la réalité humaine, elle y ramène.

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Des bombistes russes aux meurtriers délicats de Camus : histoire d’un transfert artistique

Depuis son engagement dans la Résistance, Camus a toujours mené une réflexion sur la question de la violence. Elle s’imposait à lui en termes de conscience intellectuelle et morale et le poussait à prendre position par rapport aux événements et aux circonstances de l’époque. Rappelons que sous le régime de Vichy, les résistants furent traités de « terroristes ». Dans son article « Le sang de la liberté » (Combat, 24 août 1944), pendant l’insurrection à Paris, Camus était catégorique : « Une fois de plus, la justice doit s’acheter avec le sang des hommes ». Il justifiait alors la lutte armée des résistants au nom des « raisons immenses » ayant « la dimension de l’espoir et la profondeur de la révolte ».

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