Poésie et propagande dans la France occupée : de la vérité des métaphores à la poétique des noms propres
La littérature participe de l’activité cognitive qui produit la vision du monde d’une époque. Dans une conjoncture de « rupture » à grande échelle des cadres de l’expérience (E. Goffman), comme celle que produit en France la défaite de 1940 et l’occupation allemande, la littérature prend une part active à la guerre idéologique entourant l’interprétation de l’événement. Prenant l’exemple de la poésie (afin de mieux insister sur la dimension formelle de la littérature, qui est ce qui la distingue des autres formes d’écriture), l’article montre comment la résistance politique au storytelling de la défaite (comme expiation des péchés républicains appelant une « rédemption » vichyste) s’est exprimée en suivant deux phases, sensibles notamment chez Aragon : à la « contrebande littéraire » (où le message politique passe sous le couvert de la symbolisation — allusion, métaphore, allégorie) succède le témoignage d’une poésie passée à la clandestinité et qui nomme — re-présente — les martyrs du combat pour la Libération nationale, préparant ainsi les cadres de perception collective qui régiront l’épuration.
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